Le commissaire enquêteur vient de conclure l’enquête publique en émettant un avis favorable en dépit des 85 % d’avis défavorables exprimés par les participants à l’enquête.
Cet avis s’inscrit sans surprise dans la continuité de celui du préfet des Hauts de Seine, qui avait aussi émis un avis favorable, le 28 décembre. Pourtant, le 21 janvier à l’Assemblée Nationale, la ministre a promis de garantir l’intégrité du site, déclarant: « Ce projet ne peut avoir pour conséquence de porter atteinte à cet ensemble architectural et urbanistique de tout premier plan.»
Il y a du désordre au sein de l’Etat !
Le commissaire a balayé d’un revers de main les 1367 avis défavorables car provenant de la « France entière », dont des habitants de la cité-jardin, pour ne garder finalement que les avis recueillis sur les registres papiers (29 pour et 11 contre), tout cela dans un contexte de pandémie où la plupart des personnes ont largement privilégié la voie électronique. Et si les habitants, à 80% se disent être heureux de vivre à la Butte rouge, cela le commissaire enquêteur n’en dit rien.
Il convient aussi de rappeler, puisque le commissaire enquêteur a l’air de l’ignorer, que la procédure d’enquête publique vise à permettre à chaque personne qui se sent concernée, de s’exprimer. En l’occurrence, beaucoup de personnes se sont senties concernées par l’avenir de la cité-jardin. Le commissaire enquêteur relève lui-même une « participation exceptionnellement forte » avant de s’assoir dessus. Un bel exemple de démocratie et d’utilité des concertations publiques.
Pendant l’enquête, de nombreux experts de la protection du patrimoine et du paysage se sont opposés à ce projet avec de sérieux arguments, confirmés par la lettre ouverte des architectes qui s’engagent pour la préservation de la Butte Rouge, tels que Jean Nouvel, Christian de Portzamparc, ainsi que Paul Chemetov et Jean-Louis Cohen, professeur au collège de France et bien d’autres.
Les associations locales nationales et internationales se sont aussi exprimées comme étant en désaccord avec ce projet: Association Châtenay Patrimoine Environnement, Sauvons la Butte Rouge, France Nature Environnement, Site et Monuments, DoCoMoMo, Patrimoine Environnement, ARBRES…
Par ailleurs, le commissaire enquêteur ne dit rien de la disparition nette, au terme de l’opération, de 3300 logements très sociaux (PLAI) de Châtenay-Malabry, même après reconstitution de l’offre. Pourtant, le gouvernement annonce un objectif de doublement du nombre de logements PLAI à construire en 2021 dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté. (L’Etat n’en n’est plus à une contradiction près sur ce dossier.)
En conclusion, d’un côté une enquête publique qui ne sert à rien, un commissaire enquêteur qui balaie les arguments des avis défavorables sans justification, une mairie qui souhaite chasser les pauvres alors que le tramway arrive, de l’autre le gouvernement qui déclare sans ambiguïté vouloir protéger la Butte-Rouge, et vouloir doubler les logements sociaux PLAI mais dont l’intervention se fait attendre.
C’est à l’exemple de ce qui s’est passé ailleurs, sur l’opération Europacity dans le triangle de Gonesse, où le commissaire enquêteur avait émis un avis favorable malgré une forte opposition exprimée au projet. C’est seulement ensuite une décision forte prise par Emmanuel Macron qui a mis un terme à ce projet, il l’a jugé «daté et dépassé» et estimé qu’il ne «répond plus aux aspirations de nos concitoyens».
Nous demandons à Madame Bachelot, Madame Wargon et Madame Pompili de se ressaisir et de mettre de l’ordre en protégeant à la fois l’intégrité architecturale, urbanistique et paysagère de la Cité jardin tout en préservant les logements sociaux.
Le détail du rapport d’enquête : https://www.enquetes-publiques.com/Enquetes_WEB/FR/EP20492/Dossier.awp